Dans le cadre du 5e Sommet de l’Union africaine et de l’Union
européenne, qui se tiendra pour la première fois en Afrique, les chefs
d’État et de gouvernement européens et africains devront répondre à des
défis majeurs. D’un côté, un Vieux continent fragilisé par la crise
économique, les attentats terroristes et une gestion calamiteuse des
flux migratoires. De l’autre, un Jeune continent dopé par une croissance
économique sans précédent, mais sur lequel plane encore de nombreuses
menaces telles que l’extrême pauvreté, le terrorisme, le manque
d’emplois ou le changement climatique.
Ces fléaux poussent des jeunes Africains à s’engager
dans la mouvance terroriste ou à emprunter le chemin de l’exil, parfois
au péril de leur vie. Le défi est d’autant plus grand que ces jeunes
devraient dépasser 430 millions en 2050. Le choix de mettre la jeunesse
au cœur du prochain Sommet UA-UE est donc judicieux. Car 2050 c’est déjà
demain !
Ce sont des ponts et non des murs qu’il faut construire
Dans son discours sur l’Etat de l’Union, le président de la
Commission européenne, Jean-Claude Juncker, en présentant le 13
septembre au Parlement européen les actions politiques qu’il compte
mener d’ici la fin de son mandat en 2019, a rappelé l’importance du
Fonds fiduciaire de l’UE sur l’Afrique adopté à La Valette en 2015 pour
la stabilité du continent africain et lutter contre les causes profondes
des migrations irrégulières. À juste titre, il a fustigé les États
membres européens, coupables de n’avoir apporté que 150 millions d’euros
en deux ans, alors qu’ils étaient appelés à financer ce fonds à hauteur
de 1,8 milliard d’euros d’ici 2020.
Les États membres se sont par ailleurs révélés incapables
de se répartir équitablement 160 000 migrants débarqués en Italie et en
Grèce en 2015, pendant que de nombreux pays africains font face chaque
année à des flux de réfugiés beaucoup plus importants. Surtout, l’Europe
ne peut construire un dialogue avec l’Afrique qu’à travers le seul
prisme de la « crise » migratoire.
Et quand bien-même l’UE ne peut accueillir tous les migrants, il faut
renforcer les « canaux légaux » pour les migrations. Cela signifie,
entre autre, augmenter les programmes Erasmus entre universités et
centres de recherche situés de part et d’autre de la Méditerranée, et
favoriser les échanges entre start-up africaines et européennes. Ce sont
des ponts et non des murs qu’il faut construire. Enfin, l’Europe doit
répondre à une forte exigence de son partenaire africain : de l’aide
oui, mais aussi et surtout des investissements !
L’adoption du Fonds d’investissements extérieurs de l’UE pour l’Afrique,
étrangement omis par Juncker dans son discours, va dans le bon sens. Il
faut désormais la mettre en œuvre pour favoriser le développement
d’infrastructures sociales et économiques durables et les PME, notamment
les start-up, aussi bien européennes qu’africaines, et ainsi générer de
l’emploi, notamment chez les jeunes. Pas question de soutenir des
multinationales championnes de l’évasion fiscale ou prédatrices des
ressources naturelles et minières !
Arrêtez l’hypocrisie, on sera riche ensemble ou on va se noyer tous ensemble, a dit Fatou Diome
Les nombreuses missions effectuées par le Groupe des socialistes et
démocrates européens sur le continent africain et les batailles
politiques menées au cœur des institutions de l’UE sur des dossiers tels
que les minerais de conflits m’ont convaincu qu’une approche
multidimensionnelle axée sur le développement, la démocratie, la
sécurité, les investissements et la diplomatie culturelle, celle-là même
proposée par la Haute Représentante de l’UE pour les Affaires
étrangères, Federica Mogherini, peut répondre aux aspirations des jeunes
africains, mais aussi européens.
La deuxième édition de la Semaine africaine que
notre Groupe organise à Bruxelles du 25 au 28 septembre sera l’occasion
pour placer la jeunesse au centre de nos débats et lancer des messages
clairs aux leaders de l’UA et de l’UE. Il est temps de donner un nouveau
souffle aux relations entre nos deux continents. Comme l’a si bien dit
Fatou Diome, que nous accueillerons à notre événement : « Arrêtez
l’hypocrisie, on sera riche ensemble ou on va se noyer tous ensemble ».